La mise en place d’un « comité laïcité » par Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, n’a pas manqué de faire réagir. Dans une déclaration du 10 janvier 2025, la Fédération de l’Hérault de la Libre Pensée accuse cette initiative de trahir les principes fondamentaux de la laïcité républicaine et de servir des objectifs politiques et religieux éloignés de ses fondements.
D’entrée, la Libre Pensée annonce : « Carole Delga, présidente PS de la Région Occitanie, vient de mettre en place une sorte de ‘comité’ qui aurait pour mission affichée de faire rayonner la laïcité. […] Mais nous savons que le terme de laïcité est aujourd’hui détourné. » Selon l’association, ce projet s’inscrit dans une logique où la laïcité est utilisée comme un outil politique pour « réhabiliter l’Église catholique, faire renoncer à l’abrogation de la loi Debré et encourager le choc des civilisations ».
la Libre Pensée souligne un paradoxe : les acteurs autrefois défenseurs d’une « laïcité ouverte » promeuvent désormais une « laïcité rigoureuse », mais, dans les deux cas, l’objectif serait de légitimer des choix politiques contraires à la séparation des Églises et de l’État. À ce titre, la Libre Pensée rappelle que Carole Delga est une partisane de Manuel Valls (dont elle fut porte-parole dans la campagne aux primaires de 2016), figure emblématique de cette approche politisée de la laïcité.
Des priorités sélectives
L’association critique vivement les choix de ce Conseil régional de la laïcité, en dénonçant un angle biaisé : « Carole Delga pointe donc une première chose : les atteintes à la laïcité à l’école. Parle-t-elle de la loi Debré ? Aucunement. Il s’agit uniquement de stigmatiser une partie de ceux qui mettent leur enfant dans le public. Car l’école privée, à 95 % catholique, n’est jamais mise en cause chez les partisans de la laïcité détournée. »
Ainsi, les enjeux, tels que les 12 milliards d’euros d’argent public versés chaque année aux écoles privées catholiques, ou encore le financement des cultes en Alsace-Moselle, sont totalement ignorés. De même, le silence autour des crèches religieuses installées dans les mairies ou des fêtes religieuses locales, comme celle de Saint-Roch à Montpellier, est jugé révélateur. Pour la Libre Pensée, ce « comité » ne remet en cause que certains comportements perçus comme problématiques, en se focalisant principalement sur les populations des quartiers populaires, notamment les mères voilées accompagnant les sorties scolaires. À ce sujet, Nicolas Cadène, ancien rapporteur général du défunt Observatoire de la Laïcité a apporté une réponse cinglante et argumentée au ministre de l’Interieur, Bruno Retailleau, qui ressort la hache de guerre contre les étudiantes et les mamans musulmanes.
Une instrumentalisation géopolitique
La critique de LLP ne s’arrête pas au plan local. L’association voit dans ce détournement de la laïcité une dimension géopolitique. Elle s’interroge : « Mais au fait, madame Delga : d’où vient le terrorisme que votre soi-disant ‘laïcité’ serait censée combattre ? »
En s’appuyant sur des propos de François Hollande concernant le soutien à des « rebelles » syriens liés à des organisations terroristes, la Libre Pensée dénonce une hypocrisie : « Le principal dirigeant des organisations qui ‘étaient’ regardées comme terroristes est Abou Mohammed al-Joulani. […] Mais pour les besoins de renverser le gouvernement syrien, ils ne sont plus appelés terroristes, mais ‘rebelles’. »
Selon l’association, détourner l’attention sur des débats autour de l’abaya ou des quartiers populaires permet d’éluder les responsabilités internationales et d’oublier les véritables causes du terrorisme. « Plus facile de s’attaquer à l’abaya qu’à ceux qui financent les groupes terroristes. »
Un appel à la vigilance
La Libre Pensée alerte sur un alignement de ces responsables politiques français, alignement conscient ou pas, sur des stratégies internationales dominées par des intérêts étrangers, notamment américains et israéliens, au détriment des citoyens et des principes républicains. Très dure, l’association héraultaise conclut sa déclaration en affirmant que ce « comité laïcité » est une mascarade : « Le ‘comité ‘laïcité’ de madame Delga, c’est comme ceux qui réclament la ‘Légion d’honneur’ : réservé à ceux qui n’en ont plus. » La charge est plutôt lourde, mais le constat est clair : pour la Libre Pensée, Carole Delga et son « comité » ne représentent pas une laïcité véritable, mais un outil politique destiné à servir des intérêts partisans.
« Une laïcité du concret, une laïcité de terrain » selon Carole Delga
Lors de la première réunion du Conseil Régional de la Laïcité et des Valeurs républicaines le 6 décembre 2024, Carole Delga se félicitait du rassemblement « des forces vives qui agissent au quotidien pour faire vivre la laïcité en Occitanie ». La présidente du conseil défendait alors « une laïcité du concret, une laïcité de terrain » qu’il faut « accompagner et promouvoir, notamment auprès de notre jeunesse », a-t-elle déclaré sans en donner vraiment une définition et avec un contenu très goodies et plusieurs idées d’actions qui avaient été évoquées comme : la mise en place d’un prix laïcité, d’un label pour les associations qui interviennent dans les lycées, d’un kit d’intervention ou encore l’installation de référents laïcité dans les Maisons de Ma Région.
Il y a pourtant un article qui se suffit à lui-même, le numéro 10 de la Déclaration des droits de l’Homme : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ».
Bref ! Ce qui ressemble surtout à une posture électoraliste présente néanmoins le risque d’envenimer tout un territoire et d’ouvrir une autoroute à l’extrême droite dont elle valide les thèses selon lesquelles le danger pour notre société viendrait des populations musulmanes. Faute de programme, « l’arc républicain » tente d’exister à travers une cause dont il est ignorant et qu’il semble bien incapable de défendre.
