Bayrou, Bétharram et l’école de la domination

Bayrou, la commision Bétharram et la gifle - Photo - LAB_ PLURIELLE INFO
Bayrou, la commision Bétharram et la gifle - Photo - LAB_ PLURIELLE INFO

Pour répondre à une formule à la mode, « de quoi Bayrou est-il le nom ? » , il serait difficile de n’en retenir qu’un, tant le personnage incarne à lui tout seul ce que la politique compte de plus tordu : l’opportunisme, la lourdeur, la trahison … S’y ajoutent maintenant sans contestation possible le mensonge et la violence, ou plutôt le mensonge pour couvrir la violence et l’excuser grâce à un puissant matraquage idéologique.

Cette semaine, deux médias, La Déferlante et Frustration analysent, à travers l’affaire Bétharram et la gifle de Bayrou, tout un pan de la pensée dominante conservatrice actuellement très en vogue dans les médias  : les vertus de l’autorité, prioritairement dans l’éducation des enfants que ce soit à l’école, où apparait l’uniforme qui n’a jamais existé dans notre histoire ailleurs que dans les écoles privées, et dans la famille où on menace de priver les parents supposés « défaillants » des allocations familiales.

La pédagogie noire

Dans le magazine féministe La Déferlante, Mona Cholet décrypte à travers l’affaire Bétharram, « l’un des plus grands scandales de violences physiques et sexuelles dans l’éducation en France » ce qu’elle nomme la « pédagogie noire » : « les coups et la terreur ne sont pas un accident. Ils relèvent d’une conception de l’éducation qui vise à casser l’élan vital des enfants pour les rendre dociles et fonctionnel·les« . Elle analyse les désastres d’une telle vision éducative « dans laquelle chaque génération se voit offrir la possibilité de se venger sur la suivante ». Elle conclue son analyse de l’engrenage de la violence entrainée, génération après génération, par l’éducation répressive et rabaissante, par un renversement de paradigme : «  Il y a de quoi rester rêveuse en imaginant combien la société pourrait changer si on entendait enfin les enfants« .

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Les violences n’éduquent pas, elles traumatisent

Dans son magazine Frustration, Nicolas Framont constate dans un article titré  » la gifle de Bayrou et le mythe tenace des violences éducatives » que « Le retour de cette séquence sur la scène médiatique montre que la banalisation et la légitimation des violences envers les enfants se portent bien parmi les journalistes et les politiques ». Lui aussi insiste sur le fait que les violences n’éduquent pas mais traumatisent. Il s’appuie sur l’analyse d’une pédopsychiatre hospitalière qui promeut, en opposition à l’éducation autoritaire, non pas une éducation positive tant caricaturée, mais une éducation sécurisante qui prenne en compte « l’évolution des capacités cognitives de l’enfant de gestion des émotions et du stress« . Car là est le noeud du développement de l’enfant, la sécurité matérielle, physique et affective.

Pour Nicolas Framont, « Il y a bel et bien un lien entre la gifle donnée par Bayrou à un enfant en 2002 et son silence, ainsi que le silence de la plupart des adultes, face à ce qui se produisait à Bétharram. Les violences envers les enfants seraient légitimes : c’est ainsi qu’il faut les “éduquer”, par la peur et la menace. En répondant de la sorte à Paul Vannier, le Premier ministre couvre et justifie tout ce continuum de violence« . Rappelant que Bayrou est le 1er ministre d’un président qui « a enterré le rapport de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants« , il souligne que toute la politique de son gouvernement vise « à renforcer et perpétuer toutes les formes de domination. Celle des adultes sur les enfants en fait partie« .

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Ce ne sont donc pas deux conceptions de l’éducation qui s’affrontent en réalité, l’une plus ou moins autoritaire et l’autre plus ou moins laxiste, mais deux visions philosophiques adossées à l’acceptation ou non des dominations et à la reconnaissance ou au déni de leurs conséquences sur le développement psychique et social de chaque personne. Ce qui n’est pas sans rappeler la chanson de Jacques Higelin en 1976  « Alertez les bébés » et la révolution que constitua à la même époque la diffusion du documentaire-manifeste « Le bébé est une personne ». Alors oui, sauvons aujourd’hui les berceaux, les écoles et les cerveaux des dominations imbéciles qui détruisent chez les petits humains leur capacité à devenir pleinement et solidairement humain.

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