PLUi Climat : le coup de force feutré de Michaël Delafosse

Michaël Delafosse en conseil de métropole 14 octobre 2025 - Photo - PLURIELLE INFO
Michaël Delafosse en conseil de métropole 14 octobre 2025 - Photo - PLURIELLE INFO

Mardi 14 octobre, la 74e affaire du conseil de métropole de Montpellier a rouvert un dossier important pour l’avenir d’un territoire : les trois secteurs d’urbanisation recalés du PLUi Climat adopté en juillet, Sablassou à Castelnau-le-Lez, Petit Tinal à Lattes, Meyrargues à Vendargues.

Derrière l’apparente procédure technique, l’enjeu politique est de taille, avec notamment, l’avenir des terres fertiles de Sablassou, à Castelnau-le-Lez, 2e ville de la métropole, où plane toujours l’ombre du projet de relocalisation de la clinique du Parc. Michaël Delafosse tente de donner le ton d’une démocratie apaisée : « nous avions pris l’engagement de réouvrir ces dossiers par une première modification du PLUi Climat, pour sécuriser juridiquement les projets et répondre aux orientations voulues par les communes. »

La gouvernance du ni vu ni connu et l’art de la procédure à l’envers

Mais derrière le vocabulaire policé, plusieurs élus entendent surtout une tentative de réintégrer, sous couvert d’études complémentaires, les projets rejetés en juillet. Jean-Noël Fourcade, élu à Lattes est sans détour : « vous aviez présenté le retrait comme une marque de respect envers l’enquête publique. Trois mois plus tard, vous relancez les mêmes projets. Ce n’est pas une nouvelle démarche, c’est une manœuvre administrative. On retire pour sauver le PLUi, et on remet tout discrètement à l’ordre du jour. »

Face à cette critique d’une « gouvernance du ni vu ni connu », Célia Serrano (EELV) donne le ton avec une intervention d’une rare clarté, elle renverse la logique de la délibération : « on nous demande de voter quatre modifications d’un PLUi qui n’a de climat que le nom. Les études censées justifier ces changements n’existent même pas. Décider d’abord, réfléchir ensuite, voilà la méthode. » Elle dénonce une procédure « à l’envers », « indigne d’une démocratie », et rappelle que Castelnau détient « le triste record de trois avis défavorables consécutifs lors des enquêtes publiques » ; « Trois fois, les habitants ont dit non. Trois fois, on les ignore. Et que fait-on ? On persiste, on signe, on impose. »

Sa démonstration, incisive, demande une alternative en quatre points : concertation réelle, études transparentes, débat municipal, et vote métropolitain éclairé. « Nous voulons une démocratie à l’endroit. Pas un vote dans le brouillard, mais un choix fondé sur les faits, pas sur les pressions. »

Le maintien de la pression immobilière sur les terres agricoles

Dans l’hémicycle, le contraste est saisissant. Après cette prise de parole structurée de Célia Serrano, Manu Reynaud, au nom des écologistes pour Montpellier tendance Delafosse ( comprendre les écolos socialistes ), s’engage dans un discours alibi plutôt confus : il réaffirme son opposition à l’urbanisation de Sablassou, mais s’égare sur la candidate de droite Isabelle Perrein. Mission accomplie : l’élu a fait sa sortie de route politique qui détourne l’attention du fond du débat : le maintien de la pression immobilière sur les terres agricoles.

Quant à Julien Miro élu à Castelnau, il choisit le ton de la soumission polie, une posture de soutien presque reconnaissante à l’égard du président, tranchant avec ses réserves passées. Son intervention, très cadrée, laisse transparaître une acceptation implicite de l’hypothèse Sablassou : « Monsieur le président, cette délibération acte la mise en place d’une première étude pour déterminer finalement si à Sablassou, à Castelnau, nous pouvons accueillir la clinique du Parc. (…) Avec cette étude, vous reprenez finalement en main le dossier et vous faites enfin les choses dans l’ordre et dans le bon ordre. » Et d’ajouter, ensuite : « une étude sur toute la ville doit être menée pour déterminer les différents lieux possibles d’implantation et si Sablassou s’avérait être le seul lieu, alors comme vous l’aviez indiqué Monsieur le Président, nous ne laisserions que la clinique, uniquement la clinique. » Sous couvert de méthode et de prudence, Julien Miro valide ainsi le principe d’une possible implantation à Sablassou. Sa phrase : « si Sablassou s’avérait être le seul lieu » acte déjà l’idée que ce scénario est non seulement envisageable, mais acceptable. L’inflexion notable de ce cadre du parti Renaissance, note une forme de ralliement discret, qui contraste avec son apparente fermeté passée.

Frédéric Lafforgue, maire de Castelnau-le-Lez reste toujours offensif après avoir remercié dans tous les sens le président socialiste : « je me suis battu comme un chien pour garder la clinique du Parc à Castelnau. Je continuerai à me battre. »

La démocratie du dialogue ou le vernis participatif

Le président Delafosse, lui, conclura avec un discours bien rodé. Il se présente comme garant de la « démocratie du dialogue » : « Qu’auriez-vous dit si j’étais passé en force ? Nous avons tenu compte des commissaires enquêteurs, nous ouvrons une nouvelle séquence démocratique. » Mais cette séquence ressemble à s’y méprendre à un simple redémarrage administratif, comme l’a souligné Jean-Noël Fourcade. Derrière le vernis participatif, le maire de Montpellier justifie le retour des projets écartés en juillet, sans répondre sur le fond aux critiques environnementales, il laisse cela aux prochaines études. « La vie, c’est des compromis en permanence », finit-il par lâcher, noyant le débat en le saupoudrant d’un bon sens qui masque mal la reprise en main politique du dossier.

Feu vert politique, ce qui va se passer concrètement

Techniquement, la délibération adoptée ce 14 octobre engage la première procédure de modification du PLUi Climat. Celle-ci ouvre une série d’études dites « préalables », obligatoires pour lever les réserves des commissaires enquêteurs. Ces études : mobilité, inondabilité, biodiversité, consommation foncière, capacité de stationnement, seront pilotées par les services de la métropole avec les communes concernées.

Le calendrier annoncé prévoit 18 mois de travaux, à l’issue desquels une nouvelle enquête publique devra être organisée, probablement au premier semestre 2027. Ce n’est qu’après cette enquête et l’avis des conseils municipaux que le Conseil de métropole pourra statuer définitivement sur la réintégration des OAP contestées, notamment celle de Sablassou. En clair : rien ne sera construit avant 2028, mais le feu vert politique, lui, est déjà donné.

Adoptée, la délibération acte la relance des modifications du PLUi. Une victoire procédurale pour la majorité, mais une défaite symbolique pour la démocratie locale. Au milieu des postures, la voix de Célia Serrano aura marqué la séance : ferme, argumentée, et fidèle à une exigence de transparence. Là où d’autres s’enferment dans les contorsions politiques, elle rappelle une ligne salutaire : « soyons à la hauteur de notre territoire et des générations futures. »

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