Les avocats de Robert Ménard ont exposé sur la page Facebook de la ville l’affaire opposant Eva à la mairie de Béziers. Leur communiqué contient plusieurs éléments qui relèvent du dénigrement. Un jour Zemmouriste, un jour Lepeniste, parfois Ménardiste, l’édile biterrois qui a refusé en 2023 de prononcer un mariage pour sa promotion politique personnelle s’enfonce dans la mauvaise foi.
Porte-paroles du maire, les deux avocats mettent en cause la sincérité et les intentions d’Eva. Le texte publié se permet d’affirmer l’absence supposée d’émotion de la future mariée lors de son échange avec le maire, et suggère ainsi qu’elle n’était pas réellement impliquée dans son mariage. Qu’en savent-ils ? Etaient-ils là ? Le communiqué, adressé aux 100.000 abonnés de la page Facebook de la ville, affirme aussi qu’elle aurait enregistré clandestinement la conversation, laissant entendre une intention de manipulation. Ensuite, ils émettent des doutes sur sa neutralité politique, bien qu’elle ait toujours affirmé n’être proche ni militante d’aucun parti. Les avocats évoquent une déclaration de son compagnon, qui l’aurait décrite comme « affiliée à la gauche anti-Ménard ». L’assignant à un cadre idéologique, ils sous-entendent qu’elle tenterait une exploitation politique de l’affaire…. inversant ainsi les rôles car si affaire politique il y a, c’est bien parce qu’un maire a enfreint la loi et briser une famille pour mener une campagne politique inscrite dans l’agenda de l’extrême droite, qui instrumentalise les personnes étrangères. Dans la même logique de renversement des responsabilités, les avocats soulignent une supposée contradiction entre sa volonté de discrétion et son recours à la presse, sarcasme pour le moins déplacé car Eva et Mustapha n’aspiraient à rien d’autre que de se marier.
De la simple défense au dénigrement sur les réseaux sociaux
Maîtres Antoine Savignat et Sylvain Fournier, loin d’exposer un argumentaire juridique, s’attaquent directement à la crédibilité et à l’intégrité d’Eva en insistant sur ce qu’ils jugent être des contradictions et en mettant en doute sa bonne foi, ce qui relève assurément d’une entreprise de discrédit.
Ils n’hésitent pas pour le faire à tordre la réalité, en écrivant par exemple : « Le maire de Béziers ne se place pas sur le terrain du mariage blanc et la véracité des sentiments entre les deux protagonistes… » Etonnant non ? Un revirement ? C’est pourtant l’argument d’une suspicion de mariage blanc qui a été utilisé par Robert Ménard pour refuser de marier Mustapha, soupçonné de vouloir échapper par ce moyen à l’obligation de quitter le territoire français (OQTF) dont il était frappé. Un article 40 a même été déclenché, signalant une possible fraude au mariage et une situation de bigamie.
Un article 40 qui n’a pas abouti
En effet, le 17 mai 2023, la mairie de Béziers a signalé Eva et son compagnon au parquet en vertu de l’article 40 du Code de procédure pénale, qui impose aux fonctionnaires de signaler toute infraction présumée. Une enquête a été ouverte pour déterminer si le couple avait fraudé. Le 2 août 2023, le procureur de la République a classé l’affaire sans suite, estimant que les faits n’étaient pas établis et qu’aucune poursuite ne pouvait être engagée. La suspicion qui a motivé le refus de mariage s’est révélée sans fondement.
Malgré cette décision, la mairie persiste dans son refus de célébrer le mariage. Or, la loi est claire : une OQTF ne constitue pas un empêchement juridique au mariage. Robert Ménard le sait, comme il sait que refuser un mariage pour ce seul motif, c’est risquer jusqu’à cinq ans de prison, 75 000 euros d’amende et la révocation de son mandat. Face à ce risque, c’est le choix politique qui a primé, pour lui comme pour deux autres maires en France.
Un choix politique avant tout ?
Le 5 mars 2025, les avocats du maire de Béziers tentent de réécrire l’histoire et de redéfinir le débat. Ils recentrent leur argumentaire sur la seule situation administrative du futur époux, « qui, au moment du mariage, n’aurait pas dû être présent sur le territoire national et donc devant lui [le maire] » et non plus sur le soupçon de mariage blanc, invalidé depuis par le Procureur.
Cette posture interroge. Robert Ménard a maintenu une opposition forte à ce mariage d’Eva et de Mustapha, jouant sur le climat politique. Il persiste et signe, encouragé en cela par le débat au Sénat d’un projet de loi visant à interdire en France un mariage lorsque l’un des futurs époux réside de façon irrégulière sur le territoire.
Convoqué le 18 février 2025 dans le cadre d’une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), il a rejeté la proposition du procureur de Montpellier, entraînant un procès correctionnel. Soutenu par certains médias proches de ses positions, il adopte une rhétorique victimaire face à la Justice, et il espère « avoir affaire à des magistrats de bon sens ». Merci de nous informer qu’il existerait donc, selon l’édile de Béziers, des magistrats de mauvais sens, ceux qui auraient le mauvais esprit d’appliquer la loi.
Après le délit, l’infâmie
La nouvelle loi ayant été votée le 20 février par le Sénat (bien qu’en violation de la Constitution et de la Convention Européenne des Droits de l’Homme), Robert Ménard se fera fort pour affronter ses rivaux du RN à la mairie de Bézier, de se présenter comme un précurseur si d’aventure elle était aussi votée à l’Assemblée Nationale. Mais en tout état de cause, la loi n’étant pas rétroactive, les délits commis avant son adoption seront jugés comme tels et lui font encourir inéligibilité.
Etait-ce une raison valable pour ajouter au malheur d’avoir fait exploser une famille et de l’avoir soumise à la vindicte raciste, l’infamie de dénigrer publiquement et sur un réseau officiel une mère de famille isolée et désespérée ?
