Café La Gazette à Montpellier, le 15 mai , l’ancienne ministre et sénatrice Marie-Noëlle Lienemann qui a quitté le PS en 2018, a livré son constat sur la crise du logement, et a salué la détermination municipale sur cette question souvent étouffée ailleurs : « dans d’autres communes, moins on parle de logement social, mieux on se porte. »
Le droit au logement, pourtant fondamental, semble relégué au second plan en France. « Dans un pays aussi riche, il est inconcevable que chacun ne puisse pas avoir un toit. Ça me sidère », dénonce-t-elle. Elle rappelle que le logement représente aujourd’hui la première dépense des ménages, car elle absorbe 26,8 % de leurs revenus, et que les dépenses alimentaires diminuent, ce qui contraint les plus modestes à consommer de la malbouffe. « On parle sans cesse de pouvoir d’achat, mais jamais de logement », regrette-t-elle.
Pour Marie-Noëlle Lienemann, cette invisibilisation n’est pas neutre. Elle connait le refrain, à chaque présidentielle, le sujet émerge brièvement, avant de céder sa place au débat sur l’immigration ou l’insécurité.
Réguler, construire, reconvertir : les fausses évidences
L’ancienne ministre s’alarme également du court-termisme politique dans un domaine où les cycles de production sont longs et où l’absence de régulation foncière et immobilière permet sans cesse aux prix d’exploser. Marie-Noëlle Lienemann plaide pour une régulation forte : encadrement des loyers, taxation des biens inactifs, incitations à la reconversion des bureaux : « on ne peut pas laisser des actifs dormants freiner toute dynamique urbaine. »
Mais le sujet reste complexe. Un bénévole d’Habitat et Humanisme a rappelé les limites du modèle solidaire : un logement mis à disposition à bas prix à une personne en difficulté s’est soldé par des impayés et des dégradations. De quoi refroidir les bonnes volontés. Marie-Noëlle Lienemann reconnaît ces freins, mais appelle à des politiques d’accompagnement plus concrètes, pour éviter que la peur ne l’emporte sur la solidarité.
Quant aux logements vacants, ils ne sauraient, selon elle, résoudre à eux seuls la crise : beaucoup sont inhabitables ou situés dans des zones désertées. Et si certains bureaux pouvaient être reconvertis, les obstacles techniques et la réticence des propriétaires freinent les projets.
Le logement social, enjeu écologique et de justice
En filigrane, une autre urgence bien réelle aussi : celle de la mixité sociale, car « à égalité de scolarisation, un enfant dans un quartier mixte réussit mieux. » Si certaines voix s’élèvent pour critiquer la présence de ménages des classes moyennes dans le parc HLM, estimant que ces logements devraient être réservés aux plus précaires, d’autres affirment que cette logique d’exclusion irait à l’encontre de l’objectif de mixité. Écarter ces familles reviendrait à renforcer la ghettoïsation, alors même que leur présence favorise l’équilibre social et la réussite collective.
L’ancienne ministre appelle à sortir de la logique comptable et à penser une politique du logement comme un socle commun, écologique et social, loin de l’oubli dans lequel il est relégué aujourd’hui. Un débat riche, à l’initiative de la Fédération de la Gauche Républicaine, Humains et Dignes et Nos Causes Communes en présence de l’ancienne députée Muriel Ressiguier.
