Sondage ELABE : une mise en scène politique plus qu’une photographie de l’opinion

Dissolution sondage manipulation - Photo - LAB_ PLURIELLE INFO
Dissolution sondage manipulation - Photo - LAB_ PLURIELLE INFO

Envoyé sans embargo le 7 juin par Vincent Thibault, directeur conseil opinion chez ELABE, ce sondage commandé par BFMTV et La Tribune Dimanche prétend livrer les « enseignements » d’une nouvelle dissolution.

Message de synthèse du directeur : « le RN caracole en tête à 33 %, loin devant le Nouveau Front populaire (21 %), Ensemble (15,5 %) et LR (10 %). » À lire les commentaires, l’affaire serait pliée : le RN gagne, la dissolution est un fiasco, la gauche est marginale. Envoyez les talk-show politiques et les invités !

Mais à y regarder de plus près, cette étude est une formidable manipulation méthodologique au service d’un récit politique. D’abord, l’enquête repose sur une offre politique “standard”, sans candidats locaux, sans incarnations. Autrement dit, une fiction électorale.

Ce modèle favorise mécaniquement les marques nationales (RN, Ensemble), et invisibilise l’ancrage local de la gauche unie, pourtant décisive dans une législative avec ou sans PS.

Ensuite, les marges d’erreur – jusqu’à 3 points – sont systématiquement passées sous silence dans les « enseignements ». Le RN à 33 % pourrait tout aussi bien être à 30 %, et le NFP à 24 %. Dans un duel serré, cela change tout. Le sondage exclut aussi ceux qui n’expriment pas d’intention de vote claire, soit 13 % des inscrits, et ne s’appuie que sur les plus motivés à voter. Résultat : une surreprésentation des électorats les plus disciplinés, au premier rang desquels : le RN.

Enfin, tout est fait pour transformer une tendance en fatalité : « le RN est perçu comme le gagnant de la séquence politique », annonce ELABE. Mais qui fabrique cette perception sinon les sondages eux-mêmes, repris en boucle par les médias commanditaires ?

Ce sondage n’est pas une mesure de l’opinion, c’est une opération de cadrage politique. Une mise en scène qui construit le RN comme parti hégémonique et désarme ses adversaires. À manipuler avec précaution.

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