À l’approche de la décision de la Cour de cassation qui confirmera le 30 avril prochain -ou pas- sa condamnation à 5 ans d’inéligibilité, François Commeinhes se fend d’une longue vidéo dans laquelle il s’explique (enfin) et plaide son innocence. “Risible et irresponsable” ! répond à ses arguments Véronique Calueba, tête de la liste “Ensemble sur Sète” qui a fourni le principal groupe d’opposition en 2020.
Tandis que le maire de Sète attend la décision de cassation de l’arrêt d’appel du 20 octobre 2023 qui le condamne lourdement, il sait qu’une nouvelle procédure engagée contre lui par 160 citoyen.nes, en correctionnelle, démarrera officiellement le 16 juin prochain. Cet “entre deux” se trouve marqué par la diffusion d’un reportage dans l’émission Capital de M6 portant sur les exemples de mauvaise gestion des deniers publics. Il aurait pu se passer d’une telle publicité et a donc décidé de s’adresser directement aux électeurs et électrices sétois·es.
Deux arguments contestables
Dans cette déclaration assez larmoyante, où les mots “amour” et “passion” prononcés plusieurs fois auraient le pouvoir magique d’effacer la loi et de faire fondre tout esprit critique, ne manquent que les petits cœurs. Sur le motif de ce qui pourrait mettre fin à ses fonctions, François Commeihnes développe essentiellement deux arguments.
D’abord son ignorance de l’illégalité des documents qu’il a signés pour « arroser » ses plus proches collaborateurs (directeur général des services, directeur de cabinet, chef du service immobilier) puis l’absence d’intention et d’enrichissement personnel dans ces malversations.
Sur le premier argument, on peut certes lui accorder qu’un maire signe des dizaines de courriers et d’arrêtés chaque jour et qu’il ne peut que faire confiance à l’administration. Mais relevant cette affirmation, Véronique Calueba a ressorti opportunément une tribune publiée en novembre 2020 dans laquelle elle s’étonnait, après avoir consulté le rapport de la Chambre Régional des Comptes: “Le maire dit avoir ignoré l’existence de ce dispositif (les primes accordées). Comment le croire quand les juges financiers précisent que « ce dispositif a été mis en place en dépit d’une réponse défavorable du préfet de l’Hérault au maire de Sète, qui l’avait questionné sur la légalité » du dispositif”. Avec tou·es les élu·es du groupe Ensemble pour Sète, Véronique Calueba réclamait le remboursement des 138 583 euros illégalement attribués.
Un désintéressement peu crédible
Le second argument de non-enrichissement direct est exact concernant cette affaire spécifiquement… Mais on peut s’interroger : qu’est-ce qui peut être demandé – ou acheté- à des collaborateur·trices aussi choyé·es financièrement ? Au-delà de cette procédure, la démonstration utilisée dans la vidéo est peu convaincante sur le fond: “Médecin et chef d’entreprise, je ne suis pas venue en politique en 2001, à plus de 50 ans, pour m’assurer un emploi et un salaire”. Certes ! Mais il y a bien d’autres formes de rétribution que « l’emploi et le salaire », lesquels ne protègent d’ailleurs pas de la tentation de l’enrichissement. Au vu de ses 24 ans de mandat et des multiples procédures, on a du mal à croire que l’engagement politique de François Commeinhes n’est animé que par « l’amour de sa ville » comme il le proclame.
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Le maire l’assure, quelles que soient les décisions de justice, elles n’effaceront pas son œuvre et, annonce-t-il : “J’organise la suite du mandat”. Il n‘en demeure pas moins que ce message vidéo romantisé à souhait, sonne comme un testament politique. Rejoindra-t-il son collègue et ami de 30 ans Gilles d’Ettore dans le cimetière des mandats interrompus, en attendant d’y accueillir le maire de Marseillan ?
