La conférence de presse tenue par l’intersyndicale CGT, FSU et Solidaires, ce mercredi 26 novembre était faite pour annoncer la mobilisation du mardi 2 décembre, comme « un marchepied » pour remettre au centre du débat les retraites, les salaires et la survie des services publics.
Stéphane Audebeau (FSU) a ouvert la prise de parole en rappelant que « l’abrogation de la réforme des retraites de 2023 » demeure la revendication fondatrice du mouvement. Le syndicaliste reconnaît « un premier petit pas » du gouvernement avec un report de trois mois, mais prévient : « On est loin d’être satisfaits. » Il dresse un tableau sans fioriture : « effondrement du pouvoir d’achat, cadeaux fiscaux aux grandes fortunes, politique de sévérité sociale ».
Une bombe sociale sans précédent
L’année 2024 « a vu 97 milliards d’euros finir en dividendes dans les poches des actionnaires », rappelle Patrick Schevin (Solidaires). Une donnée qui, selon lui, doit être mise en regard des 211 milliards d’exonérations et d’aides publiques aux entreprises « sans aucun contrôle, sans contrepartie sociale ou salariale ». Le responsable syndical insiste sur un récit souvent escamoté : « la fonction publique n’est pas un coût, c’est une richesse ». Et d’énumérer les lignes rouges : gel des pensions, jours de carence, suppressions de postes, budgets rabotés, minimas sociaux confinés au frigo, « indexation salariale sur l’inflation » enterrée dans un carton sous l’armoire.
Ludovic Sigal (CGT), embraye et son diagnostic est systémique : « 211 milliards par an, dont 80 milliards de cotisations sociales, on n’y touche pas ? C’est un sujet tabou. C’est inadmissible ! » Pour lui, la journée du 2 décembre doit servir de « marchepied » vers « une prise de conscience sociale » avant janvier 2026, échéance qu’il qualifie de « bombe sociale ». Il s’appuie sur un chiffre qu’il juge sous-exposé : « 22 % de la population a recours au découvert tous les mois », soit « une bombe sociale sans précédent ».
Bercy gratte 3 ou 4 milliards sur les plus pauvres
Ludovic Sigal cible aussi l’angle mort des débats budgétaires : « 211 milliards d’exonérations ignorés, mais Bercy gratte 3 ou 4 milliards sur les plus pauvres. » Il dénonce les bricolages de procédure : « 404 députés rejettent les recettes, 125 heures de débats, amendements non examinés, un Sénat qui détricote à l’aveugle. On marche sur la tête. »
Christine Saint-Joanis (FSU) pose son analyse très structurelle : « le déficit utilisé pour faire la guerre aux travailleurs est une construction politique ». Selon elle, il est « fabriqué par les baisses d’impôts sur les plus riches et les aides publiques jamais évaluées ». Elle rappelle une évidence économique souvent oubliée : « si on est augmenté, on cotisera plus ». Et pointe l’outil le plus concret pour financer la protection sociale : « augmenter salaire, traitement et pension ». Elle ajoute un dernier pilier : « L’égalité salariale entre les femmes et les hommes fait aussi rentrer de l’argent ».
Le rapport de force, c’est la grève et la manifestation
Ludovic Sigal renchérit alors sur l’impact budgétaire d’une future loi à horizon « fin 2026 ». Il glisse, avec une ironie, que « certains considèrent fou de taxer les riches », mais conclut : « c’est la rue qui avait imposé le sujet, c’est à la rue de reprendre la main ». Il recadre enfin les attentes sur le 2 décembre : « on espère la mobilisation la plus forte possible », même si « le flou politique » peut compliquer l’impulsion. « Janvier sera un test de réalité », prédit-il : une fois le budget connu et imposé, procédure ou non : « la réponse du monde du travail viendra ». Frontal et direct, Patrick Schevin explique : « le budget, c’est la vie des gens. On ne parle pas d’euros, on parle de nos vies : l’hôpital, c’est la santé, l’école, c’est l’éducation ». Et rappelle l’essentiel : « le rapport de force, c’est la grève et la manifestation ».
Cet appel intersyndical se veut large. « Nous ne fermons pas les portes », insiste Stéphane Audebeau, qui assume une stratégie d’offensive sociale : « moment politique fort, nous avons décidé d’y aller ».
Si chacun reconnaît « des stratégies différentes », tous partagent le besoin de « reconstruire une intersyndicale unitaire ». Dans la ligne de mire, Gérard Larcher. Le Sénat « rétablira la réforme des retraites » avait prévenu Gérard Larcher. Cet ancien vétérinaire incarne aux yeux de l’intersyndicale le paradoxe d’un Sénat « aveugle » dès qu’il s’agit d’évaluer 211 milliards d’exonérations, mais « sur-armé dès qu’il faut renvoyer la facture aux travailleurs ». Toujours avec ironie, Ludovic Sigal indique qu’« il faudrait un CHSCT au Sénat » pour éclairer les contradictions entre discours sociaux et décisions budgétaires. Pour rappel, le Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail abandonné en 2017 avait pour vertu, entre autres, de proposer de veiller aux conditions de travail, à la santé physique et mentale des salariés. Alors pourquoi pas aujourd’hui cette veille auprès des sénateurs ?
Les syndicats sont bien décidés à reprendre la main sur le récit social, avec une certitude : que le 2 décembre sera la ligne de départ pour une montée en puissance de la mobilisation.
Hérault : Les rendez-vous du 2 décembre :
- 10h30 Bédarieux, Maison des syndicats
- 10h30 Béziers, Bourse du travail
- 11h00 Clermont l’Hérault, Allée Salengro
- 10h30 Montpellier, CPAM
- 12h00 Sète Place de la mairie