[EDITO] Macronite, n,f : de macron + -ite ; du latin macronus, ‘illusion’. Inflammation de l’appendice cérébro-civitatem. Crise de macronite aiguë, qui nécessite une destitution. Macronite larvée, vermineuse. Diagnostiquer une macronite.
Voeux 2025, Emmanuel Macron a donné le spectacle d’un mélange d’autosatisfaction, de mea culpa feutré et de promesses verbalement ambitieuses, mais sans aucune force programmatique concrète.
Ne vous y laissez pas prendre, le président de la République ne souffre pas de troubles de la personnalité schizoïde qui l’isoleraient dans son propre monde intérieur, dominé par des pensées ou des fantasmes irréels. En revanche, depuis ce 31 décembre, il est bien identifié comme le patient zéro atteint de déni politique incurable, appelé depuis : une macronite aiguë, larvée, ou vermineuse dont les symptômes se traduisent par la capacité à rendre complètement schizophrène ceux qui l’ont mandaté.
Dissolution ou l’art de l’instabilité organisée ?
Sans sourciller, le président a admis que la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024 n’avait pas eu l’effet escompté. « Plus d’instabilité que de sérénité », a-t-il concédé. Mais, qu’on se rassure : il « en prend toute sa part ». Traduction : oui, il y a un bazar sans nom, mais merci d’oublier que cela est dû à son non-respect de la démocratie (l’empressement à donner le pouvoir au RN en juin puis le déni de la victoire du Nouveau Front Populaire en juillet !). Le chef de l’État, avec la solennité qui lui est chère, a alors plaidé pour un « ressaisissement collectif » comme si d’autres que lui-même s’étaient plantés dans les grandes largeurs. Une manière élégante de dire qu’il serait temps que tout le monde se mette enfin d’accord sur quelque chose. « Je souhaite que l’année qui s’ouvre soit celle du ressaisissement collectif, qu’elle permette la stabilité, les bons compromis pour prendre les bonnes décisions au service des Français, car nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre ». On a compris que les « bonnes décisions », pour lui, c’est de poursuivre sa politique, même si elle est rejetée par une majorité d’électeur·trices.
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2025 : les citoyens vont « trancher »
C’est l’info à suivre cette année, le clou du spectacle, en un verbe : en 2025, Emmanuel Macron demandera aux Français de « trancher » sur des « sujets déterminants ». Référendums ? Conventions citoyennes ? Une grande tombola nationale ? Mystère. Sur quel sujet ? Avec un peu de chance, on pourra voter pour savoir si la dissolution, finalement, c’était une bonne idée. Ou plus optimiste, il fera un référendum sur la réforme des retraites qui lui donnerait l’opportunité de démissionner comme de Gaulle après le référendum de 69. Posture plus chic que de se faire destituer. Mais n’est pas de Gaulle qui veut.
Un « réveil » européen… L’Europe roupille ?
Comme tout bon discours présidentiel, impossible de passer à côté du couplet européen. Cette fois, Emmanuel Macron a invoqué un « réveil européen » : scientifique, intellectuel, technologique, industriel… Une liste qui ressemble plus à une séance d’introspection d’un club de développement personnel qu’à une feuille de route concrète. Mais bon, quand ça sonne bien, ça fait la messe. Entre deux appels au « sursaut », il a dénoncé les « lois dictées par d’autres ». Si personne ne sait vraiment qui sont ces « autres », le message est clair : la France ne se laissera pas faire, elle va « en finir avec la naïveté. Dire non aux lois du commerce édictées par d’autres et que nous sommes les seuls à encore respecter. » Comprendre : les tracteurs peuvent rester dans les granges.
Emmanuel Macron boucle ses vœux avec un remix d’incantations et de prescriptions. Il nous invite à « l’audace et au sens des décisions », il clame que « ce que nous tenions pour acquis ne l’est plus », et feint d’oublier que peut-être ce sont ses politiques successives qui ont fragilisé ou détruit ces acquis. Occasion pour le coup d’en remettre une couche sur « il n’y aura pas de prospérité sans sécurité ». Quant à « la paix du quart de siècle qui vient », elle reposera, selon le président, sur « nos choix d’aujourd’hui » que ses 10 minutes de récitation ne sont pas parvenues à définir. Son silence sur le génocide à Gaza et son déni de la décision de la Cour pénale internationale font-ils par exemple partie des choix en question ? Une belle manière en tous cas d’esquiver sa responsabilité et d’effacer la sombre ardoise de ses choix depuis son entrée au gouvernement Hollande.
[VIDEO] Élysée, les voeux 2025 d’Emmanuel Macron
Pour 2025, je nous souhaite d’être unis, déterminés et fraternels. pic.twitter.com/LMLVR8pdlK
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) December 31, 2024