Nadège Abomangoli : faire vivre les débats en dehors de l’hémicycle

Sylvain Carrière député de l'Hérault et Nadège Abomangoli vice-présidente de l’Assemblée nationale à Pézenas - Photo - Jean-Philippe Vallespir
Sylvain Carrière député de l'Hérault et Nadège Abomangoli vice-présidente de l’Assemblée nationale à Pézenas - Photo - Jean-Philippe Vallespir

À Pézenas, les Héraultais·es ont eu la chance de découvrir parmi les invité·es au FIestival, Nadège Abomangoli, vice-présidente de l’Assemblée nationale. À ce titre, elle est la première femme noire à présider des séances de l’Assemblée nationale. Une première dans l’Histoire dont les Insoumises ne sont pas peu fier·es.

Au-delà du symbole de cette « Nouvelle France » que le mouvement LFI veut extraire des clichés racistes, c’est sa modestie, sa lucidité et sa maîtrise de tous les sujets sur lesquels elle a été interrogée qui ont impressionné celleux qui sont venu•es débattre avec elle dimanche dernier.

« On est en butte à une violence permanente »

« On est des député·es, mais on est aussi et avant tout des militant·es » tient-elle à affirmer pour expliquer en quoi la connaissance du terrain et le contact permanent avec les gens permettent aux insoumis·es d’imposer à l’Assemblée nationale le concret de leur vie et leur donnent de la force. « Nous sommes moqués pour cela, mais ce sont les autres qui sont hors sol ». Elle n’en fait pas mystère, la lutte est difficile. « On est en butte à une violence permanente ». Les médias s’acharnent à faire croire que les insoumis « bordélisent » les débats à l’Assemblée nationale alors que Nadège Abomangoli en témoigne, « la violence est en face » . Dès qu’une femme de gauche et particulièrement les députées insoumises prennent le micro, c’est la bronca. Elles parlent dans un brouhaha continu, aux relents sexistes avérés. Elle rappelle que même l’ancien président de l’assemblée, le très conservateur Jean-Louis Debré, trouve que les débats ont de tout temps été vifs, voire violents, au sein de l’assemblée qui n’a donc pas attendu l’entrée des insoumis pour connaître des remous. Et « c’est à un ministre [Dupond-Moretti, NDLR] qu’on doit un bras d’honneur, aux membres du RN des propos ouvertement racistes » rappelle la vice-présidente qui s’enorgueillit que la voix des Insoumis·es sortent des murs de l’assemblée et sensibilisent les citoyen·nes les plus modestes et les plus exploité·es à ce qui s’y passe : « on fait sortir le débat en dehors de l’hémicycle et monter l’audience de la chaine Public Sénat».

La gauche ne se grandit pas en reprenant le narratif de la droite

Pour Nadège Abomangoli, le pire est quand les attaques proviennent de celleux qui se réclament de la gauche ou du moins qui ont été élu·es sur son programme. Rappelant la déclaration récente de Carole Delga selon laquelle Jean Luc Mélenchon ferait « plus peur que Marine Le Pen sauf en Seine Saint Denis » – ce qui avait motivé un communiqué dont elle est signataire -, Nadège Abomangoli s’est contentée de déclarer  en terre occitane « c’est un peu minable et très lâche ». Plus que tout, ce qui la soucie, c’est le mépris que ça révèle pour « les millions de personnes pour qui le RN constitue une vraie menace ».

Si elle ne veut pas « mettre le PS au centre des débats », elle constate que « ce sont nos petits amis du NFP qui ont joué la division et participé à notre diabolisation ». Ils l’ont fait sur des bases qu’elle juge extrêmement dangereuses de reniements, de banalisation de l’extrême droite, et par une instrumentalisation du massacre du 7 octobre 2023. Pour elle, rompre l’accord du NFP sur ce motif et participer à la manifestation du 12 novembre 2023 contre l’antisémitisme à Paris, c’était cautionner « une fausse lecture de l’attaque du Hamas qui l’a placée sur le plan de l’antisémitisme alors qu’il s’agissait d’une étape d’une histoire coloniale ». C’est d’ailleurs tout le non-sens de ceux qui parlent de « pogrom« , à l’exemple de Robert Ménard qui le proclame en grosses lettres sur la façade de sa mairie de Béziers.

Quelques points marqués dans le combat parlementaire

Malgré cette campagne de diabolisation systématique de la France Insoumise, Nadège Abomangoli acte les avancées obtenues dans les institutions, à la suite des législatives de juillet 2024 qui avaient placé le Nouveau Front Populaire en tête (alors qu’il est avéré maintenant que Macron préparait la victoire du RN) : deux vice-présidentes insoumises, deux « secrétaires » au bureau de l’Assemblée et surtout, la présidence de la commission des finances et celle des affaires économiques. Nadège Abomangoli en souligne l’importance : « ça donne des moyens d’investigation, ça permet d’auditionner des patrons et des acteurs économiques, » de saisir des documents comme les accords plus ou moins secrets entre le gouvernement et des entreprises, autant de moyens qui n’étaient pas utilisés avant que les députés insoumis ne s’en emparent. Autrement dit, de lever pas mal de lièvres et de montrer au grand jour les scandales de la République qui collent aux basques des affairistes au pouvoir. Elle aurait pu citer également l’incroyable travail fourni par les commissions d’enquête sur les crèches privées par exemple ou sur l’affaire Bétharam où les député·es LFI ont joué un rôle moteur…

Le pire ou la destitution

La députée de Seine Saint-Denis ne se fait guère d’illusions. Les acrobaties politiciennes auxquelles devra se livrer le nouveau Premier ministre pour échapper à la censure se traduiront sans doute par une fuite en avant réactionnaire. « On tente de nous vendre un énième budget d’austérité alors que le problème des finances publiques n’est pas un problème de dépenses, mais de recettes » indique-t-elle en citant les 280 milliards de fraudes fiscales à récupérer.

L’heure n’est pas pour elle aux « conclaves et réunions bidons », encore moins à opposer des contre-budgets bricolés sur des lambeaux du programme NFP, mais à faire tomber Macron. Elle souligne que la motion de destitution a été empêchée la dernière fois par Marine Le Pen qui s’affirme de plus en plus comme béquille de la macronie (90% des textes du gouvernement sont votés grâce au RN). Le groupe insoumis espère que la prochaine motion de destitution, déjà signée par la majorité des députées du défunt NFP ira à son terme, c’est-à-dire jusqu’au vote, qui permettra de voir qui est pour la poursuite de la politique suicidaire des macronistes et qui est pour y mettre un terme.

Répondant à des questions précises sur l’Ukraine, le Sénégal, le budget de l’armement ou la demande du président colombien Gustavo Petro que l’ONU envoie une force d’interposition en Palestine, Nadège Abomangoli a montré qu’elle n’était pas membre de la commission des affaires étrangères pour y faire de la figuration. Bien que les pouvoirs de l’assemblée soient bien faibles dans ce domaine qui reste entre les mains du président de la République, elle souligne que « quand il y a débat sur des questions internationales, c’est toujours à la demande des Insoumis·es ». Lesquel·les comptent bien à l’avenir soumettre ces politiques fondamentales pour la paix à des processus plus démocratiques.

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