Face à Carole Delga, l’opposition à la LGV se manifeste

Face à Carole Delga, l’opposition à la LGV se manifeste - Photo - Jean-Philippe Vallespir
Face à Carole Delga, l’opposition à la LGV se manifeste - Photo - Jean-Philippe Vallespir

LGV Montpellier-Perpignan, colère sourde en alerte à Frontignan, mardi 27 mai. Tandis que la présidente de la région Occitanie Carole Delga venait rencontrer le nouveau président de Sète Agglopôle Méditerranée, Loïc Linarès, une cinquantaine de citoyennes et citoyens se massaient à quelques mètres, devant le siège de l’Agglo, à l’appel de la Coopérative Intégrale du Bassin de Thau, de Bancs Publics et de plusieurs autres collectifs venus avec leurs banderolles.

Martelé au rythme des casseroles avec un mot d’ordre : « Delga dégage ! La LGV, on n’en veut pas ! » En cause, le sentiment d’un territoire prochainement saccagé par la Ligne nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP), immense projet ferroviaire à grande vitesse, présenté comme un maillon du corridor méditerranéen européen, mais largement contesté sur le terrain. La présidente est restée fidèle à sa définition d’une élue « à portée d’engueulade » et elle est venue au contact.

« ZAD partout ! » Un projet « écocide » selon ses opposants

Brigitte Cohen, présidente de l’Observatoire du Pays de Thau, et Pierre Miraillès, vice-président de l’association Alerte LGV Thau (ALT), alertent sur les effets collatéraux de la LNMP : destruction d’espaces naturels sensibles, pollution des nappes phréatiques (notamment Issanka, Bessan, Florensac), expropriations de riverains, enclavement accru de Sète, nuisances sonores, et lourdes infrastructures comme les viaducs ou le tunnel sous la Gardiole.

Mais à Frontignan, en ce mois de mai 2025, le slogan principal restera : « ZAD partout ! », en référence aux « Zones à défendre » qui accueillent de fortes mobilisations, comme un avertissement lancé en amont des élections municipales. « Soi-disant vous êtes une femme de gauche ! Moi j’ai voté pour vous, madame Delga… mais là, vous nous sacrifiez ! » lance une manifestante. « Je n’ai pas de leçon à recevoir sur la gauche » rétorque la présidente. La tension est palpable, à la hauteur de la déception, avec dans les esprits l’espoir que ce projet ne passera pas.

[VIDEO] Visite de Carole Delga à l’agglo de Sète au son des casseroles :

Dialogue de sourds

En marge de la manifestation, Félix Caron, président de l’association ALT, nous confie par téléphone : « Ce n’est pas parce que Loïc Linarès a pris la tête de l’Agglo que les critiques s’éteignent. Le conseil de développement et les citoyens demandent toujours un vrai débat de fond sur la pertinence de ce projet. » Selon lui, une alternative moins coûteuse (–30 % selon une étude de la SNCF) existe, épargnant le territoire tout en répondant aux enjeux de grande vitesse et desserte locale. Félix Caron insiste : « On n’a jamais eu de discussion sérieuse avec Carole Delga sur ce sujet. Elle évite systématiquement le débat. »

Détour par Vic-la-Gardiole : opération diversion ?

Au programme officiel : visite du domaine du Mas Vieux des Aresquiers, à Vic-la-Gardiole, pour présenter un projet de Maison du Littoral, financé à hauteur de 10 millions d’euros HT. Sur huit hectares, ce centre devrait sensibiliser aux enjeux écologiques du littoral, avec parcours pédagogique, microstation, espaces pour mobilités douces et parking paysager.

Mais cette séquence dédiée aux journalistes ressemblait davantage à une opération de diversion. Un écran de verdure pour éloigner l’attention d’un sujet brûlant : la fracture démocratique autour de la LGV. Bien évidemment la rédaction de Plurielle info ne pouvait se laisser cornériser éditorialement sur ce projet de Maison du Littoral déjà largement documenté. Interview LGV oblige…

[VIDEO] Interviews de Carole Delga et Loïc Linarès :

840 000 euros gelés : statu quo tendu

La question du gel de la participation de Sète Agglopôle, décidée par François Commeinhes, plane toujours. Interrogée sur le sujet, Carole Delga temporise : « Ce ne sont pas les 840 000 euros qui bloquent, mais un changement de position non concerté. » Loïc Linarès, de son côté, confirme que la somme reste gelée : « On travaillera ça dans le temps, sereinement. »

Des réponses qui illustrent bien le tiraillement local : entre une région déterminée à défendre « un projet structurant » et une population qui se sent exclue de la décision. Loïc Linarès tentera d’apaiser : « On veut retisser un lien avec la Région, avec l’État, pour retrouver une méthode. » Mais la défiance citoyenne devrait rendre la tâche ardue.

Carole Delga aura beau se réfugier dans sa volonté de « mettre à plat la réalité », tout en dénonçant « la brutalisation du débat », en face d’elle les habitant·es se sentent eux aussi violenté·es par « la non-concertation ou plutôt la fausse concertation et même la manipulation »

Les vrais-faux discours sur la transition écologique

Être mandaté ne signifie pas avoir un mandat sans contrôle. La mobilisation de mardi révèle plus qu’un simple refus d’infrastructure. Elle traduit une prise de conscience d’une politique jugée verticale, éloignée des préoccupations locales. Elle traduit aussi « la nécessité d’une démocratie en continu et en transparence » expliquent les membres des associations mobilisées sur ce sujet.

La ZAD, ici, c’est aussi le cri d’une démocratie à réinventer, où les choix d’aménagement se font avec, et non contre les habitant·es. Les casseroles de Frontignan rappellent que la contestation ne faiblit pas, dans une région marquée par le bétonnage du littoral, les projets XXL et les vrais-faux discours sur la transition écologique.

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