Non, nous n’avons pas besoin d’un homme ni d’une femme, providentiel(le). Non, nous n’avons pas besoin d’un candidat unique, fut-il (surtout s’il est) désigné par une primaire à laquelle ne participe jamais qu’une petite élite qui s’autoproclame « la gauche » éclairée et qui confisque la parole de tous les autres.
Ce dont nous avons besoin, c’est d’un projet de société qui commence à rompre clairement avec les dogmes du libéralisme économique imposés comme horizon indépassable au pays depuis 50 ans.
Ce dont nous avons besoin, c’est d’une constitution qui redonne au peuple le pouvoir – vraiment, concrètement – et pas seulement celui de voter pour des élus qui font ensuite ce qu’ils veulent entre deux élections. Un pouvoir qui ne s’arrête pas aux portes des entreprises et qui fasse reculer la monarchie qui y règne aujourd’hui.
Rêvons assez fort du monde meilleur
Ce dont nous avons besoin, c’est d’un projet de société qui « fasse société », qui redonne du sens à nos vies, à nos solidarités, aux choix de ce que l’on produit, au pourquoi on le produit et à la façon dont on le produit. Qui redonne du sens à ce que l’on échange, à ce que l’on partage. Qui économise les êtres humains et la nature. Qui réconcilie les hommes et les femmes, les générations, ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas.
Un projet de société où l’activité économique s’adapte aux besoins humains et non l’inverse ; où la recherche prépare l’avenir, où l’école prépare des citoyens et non des variables d’ajustements économiques. Un projet de société qui soigne, qui soutient, qui construit des toits au-dessus des têtes avec des murs pour se protéger du froid ou de la chaleur et non « des autres » ; qui construit des ponts et des voies ferrées pour se rejoindre.
Un projet de société qui veille sur notre imaginaire et notre mémoire dans les musées, les bibliothèques, les théâtres, les opéras, les cinémas, les salles de spectacles et dans la rue. Un projet de société qui proclame et prépare la paix, sans autres ennemis que l’ignorance, la cupidité, le racisme et la haine.
Nous ne partons pas de zéro
Non, ce projet de société n’est pas à construire de fond en comble. Non, nous ne partons pas de zéro. Il y a des propositions, des programmes qui existent déjà, que des militants et des citoyens peaufinent depuis des années : celui des insoumis, celui des verts, celui du PCF.
Celui des insoumis a déjà réuni 22% de l’électorat. Ça vous semble peu comme début ? Ils sont plus ou moins élaborés ? Ils ne sont pas d’accord sur tout ? Ils sont d’accord sur l’essentiel : le but. Et s’ils divergent parfois sur le chemin à prendre, où est le problème ?
Le poète a raison : « Le chemin s’ouvre en avançant ». Alors, parlons programme, rêvons assez fort du monde meilleur que nous voulons tous pour qu’il devienne possible. Et arrêtons de nous imposer des conditions inutiles (un seul candidat, un seul programme…) pour avancer.
Ce qui nous freine, ce n’est pas la désunion de la gauche, mais les raisons de celle-ci et le refus de les identifier clairement :
On s’attaque aux dogmes du libéralisme (c’est-à-dire à la loi du plus riche pour parler clair) oui ou non ? Sur cette question, c’est oui ou c’est non. Pas de « peut-être que », de « oui, mais » ni de « non, mais ».
Il n’y a que deux côtés à cette barricade. Et aucun candidat unique n’en créera de troisième ni ne remplacera jamais notre propre mobilisation pour faire valoir nos propres exigences. Personne n’a jamais avancé d’un millimètre en passant son temps à faire la liste des obstacles qu’il pense trouver sur son chemin (et s’invente souvent). Ni en attendant qu’un autre (un candidat par exemple) lui dise comment il doit mettre un pied devant l’autre.
