Brève histoire de l’Ukraine 882-1994 par Nicolas Desagher. Les Varègues, ethnie scandinave apparentée aux Vikings, fondèrent la Rus’ de Kiev 882-1240¹ . Cité-État qui est la plus ancienne entité politique commune à l’histoire des trois États slaves orientaux modernes : Biélorussie, Russie et Ukraine.
Sa puissance et son aura dominèrent toute l’Europe orientale. Elle donna une reine à la France : Anne de Kiev. À ce moment-là, Moscou n’était encore qu’une forêt. Kiev périclita à cause des invasions mongoles. Dès le quatorzième siècle apparurent dans le Nord de la mer Noire, les Cosaques. C’était des paysans guerriers, semi-nomades, que les souverains voisins laissèrent prospérer dans une région tampon de confins qui permettait de contrer une expansion ottomane venue du Sud. Confins, limite, marche… donnent la racine slave de kraï qu’on retrouve dans le nom « Ukraine ».
Le malentendu
En 1654 l’Hetmanat cosaque (entité politique et géographique) se trouve au milieu de trois puissances, le royaume de Pologne-Lituanie au nord-ouest, la Russie Tsariste au Nord-Est et les Ottomans au sud. Afin d’équilibrer les forces et dans le but de freiner des guerres sans fin qui ont souvent lieu sur son territoire, l’Hetmanat se décide à faire alliance avec la plus faible des trois puissances : La Russie. C’est le traité de Pereïaslav².
Mais il y a un malentendu, les Russes comprennent que les Cosaques se soumettent au Tsar³. Suite à la révolution russe, l’Ukraine de 1917 à 1922 reprend son indépendance, sur un territoire plus grand que celui que nous connaissons aujourd’hui⁴. Les Soviétiques les remettront au pas. Pour mater la paysannerie nationaliste et remuante ukrainienne, le pouvoir central soviétique, donc russe, provoque une famine/génocide en Ukraine : l’Holodomor⁵ qui cause la mort de 2.6 à 5 millions de personnes.
L’indépendance rejetée
Lors de la Seconde Guerre mondiale et de l’invasion allemande en Ukraine, certains nationalistes ukrainiens virent dans un premier temps positivement ces « libérateurs » qui chassèrent les occupants russes et soviétiques de leur territoire. C’est le cas notamment de Stepan Bandera⁶, dirigeant de l’armée insurrectionnelle ukrainienne UPA⁷. « Le 30 juin 1941, à Lviv, il proclame l’indépendance de l’Ukraine. Cette proclamation étant rejetée par l’occupant allemand, il est arrêté le 5 juillet 1941 et envoyé l’année suivante en camp. Libéré en septembre 1944, il se retourne à nouveau contre l’Armée rouge et demande des armes à l’Allemagne nazie pour reconquérir l’indépendance de l’Ukraine. Ses frères, victimes du régime nazi, sont morts dans les camps de concentration, ce qui a renforcé son opposition tant contre les nazis que contre les Soviétiques. »
En 1954, à l’occasion du tricentenaire du traité de Pereïaslav, Nikita Khrouchtchev transféra la Crimée⁸ de la RSFS de Russie (République socialiste fédérative soviétique de Russie) à la RSS d’Ukraine, (République socialiste soviétique d’Ukraine) au sein de l’Union soviétique. À noter qu’avant 1945, la Crimée était une république autonome de la Fédération de Russie, statut supprimé par Staline en 1945, en même temps que la déportation de sa population tatare remplacée par des colons russes⁹.
Le oui l’emporte à 92,26%
En 1991, un référendum sur l’indépendance de l’Ukraine¹⁰ est organisé. Le oui l’emporte à 92,26%. Dans l’Oblast (région) de Donetsk, le oui est à 86,96%, mais seulement à 56,21% en Crimée qui est fortement peuplée de colons russes. L’Ukraine hérite d’un arsenal nucléaire conséquent sur son sol issu de la dislocation de l’Union soviétique. Le 5 décembre 1994 est signé à Budapest un mémorandum¹¹ engageant l’Ukraine, les États-Unis, le Royaume-Uni et la Russie qui accordent des garanties d’intégrité territoriale et de sécurité à l’Ukraine en échange de leur ratification du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et le transfert des ogives nucléaires à la Russie.