Le choc est immense dans les quartiers nord de Marseille. Jeudi 13 novembre, un jeune homme de 20 ans a été abattu en plein jour dans le 4e arrondissement, à proximité du Dôme.
Selon le procureur de Marseille, Nicolas Bessone, une moto s’est portée à hauteur du véhicule de la victime avant que le passager n’ouvre le feu à plusieurs reprises. Des étuis de 9 mm ont été retrouvés sur place. Le parquet a ouvert une enquête pour assassinat en bande organisée et association de malfaiteurs.
Rapidement, La Provence a révélé que la victime serait le jeune frère d’Amine Kessaci, militant associatif et écologiste de 22 ans, figure marseillaise de la lutte contre le narcobanditisme. Une information confirmée à l’AFP par Christine Juste, adjointe écologiste au maire.
Inconnu des services de police et de justice, le jeune homme “voulait devenir policier et devait repasser le concours de gardien de la paix le mois prochain”, indique une source proche de l’enquête citée par La Provence. Le procureur a confirmé sur franceinfo que la victime était “extérieure à tout ce qui gangrène Marseille”.
Ce drame survient cinq ans après l’assassinat de Brahim, un autre frère d’Amine Kessaci, tué en 2020 dans un “narchomicide”, contraction des mots narcotrafic et homicide. Son corps avait été retrouvé carbonisé dans une voiture.
C’est dans ces circonstances qu’Amine Kessaci avait fondé Conscience, une association d’aide juridique et psychologique aux familles endeuillées par les règlements de comptes. Il portait la voix de ces proches longtemps relégués “au silence et au stigmate”, et avait défendu leur cause lors des élections européennes de 2024.
Depuis un mois, il vivait sous protection policière en raison de menaces. Deux pistes sont désormais envisagées par les enquêteurs : une opération d’intimidation pour le toucher à travers sa famille, ou une erreur de cible. Aucun lien établi avec le narcobanditisme n’est confirmé à ce stade.
Certains responsables politiques ont immédiatement réagi. “Aucune mère ne devrait vivre cela”, a déclaré Christine Juste à l’AFP. La cheffe des Écologistes, Marine Tondelier, a dénoncé des “circonstances atroces” dans un message public de soutien, en ajoutant : « nous t’aimons. Nous serons là pour toi. Aujourd’hui et tous les jours qui suivront. » Le maire de Marseille, Benoît Payan, a évoqué une ville “en sidération”, rappelant que la victime “voulait devenir gardien de la paix”.
La lecture livre d’ @kessaciamine1 « Marseille, essuie tes larmes. Vivre et mourrir en terre de narcotrafic » est une vraie claque.
Il perd aujourd’hui un deuxième frère de 19 ans, qui voulait devenir policier, dans des circonstances atroces.
Amine : nous t’aimons. Nous serons…
— Marine Tondelier (@marinetondelier) November 13, 2025
Dans son livre Marseille, essuie tes larmes (Le Bruit du Monde, 2025), Amine Kessaci écrit : “la politique ne m’a jamais tendu la main, alors j’ai décidé de la prendre à la gorge […]. Brahim, c’est toi qui m’a jeté dans ses bras le jour où tu as brûlé dans une voiture.” Une phrase qui prend aujourd’hui un relief tragique.
En quatre ans, ce jeune homme issu d’une fratrie de six est devenu l’un des visages du combat citoyen contre les violences du narcotrafic. Malgré la perte de deux frères, il n’a cessé de défendre la justice, la prévention et la dignité des victimes. Son engagement, souvent mené dans l’ombre, s’impose comme l’un des témoignages les plus courageux de la lutte citoyenne et politique face au crime organisé.
Le procureur Bessone l’a rappelé : le combat judiciaire sera “de longue haleine”. Mais pour Amine Kessaci, il est devenu, en plus, une affaire de survie et de vérité.
